Portrait : Héloïse Courvoisier
Portrait : Héloise Courvoisier a 25 ans. Kinésithérapeute au Centre Lecourbe, elle est aussi depuis trois ans une athlète rompue à la compétition ! Et elle prépare une échéance de taille. Découvrez son témoignage.
Pouvez-vous vous présenter et présenter votre parcours et votre métier ?
Diplômée en kinésithérapie depuis 2020, j’ai effectué mon stage de dernière année d’études au sein de l’USEP du Centre Lecourbe, juste avant la Covid. Au moment de chercher un poste de kiné, j’ai candidaté à Lecourbe car j’étais très attachée aux jeunes et à l’équipe déjà. En août 2020, je suis revenue y travailler, cette fois-ci en CDI, en tant que kiné polyvalente sur plusieurs dispositifs, dont l’IEM et l’USEP jusqu’en 2021. Aujourd’hui j’interviens exclusivement à l’IEM et ses passerelles avec le SESSAD moteur.
Auprès de quel public intervenez-vous à Lecourbe ?
J’interviens auprès d’une quinzaine de jeunes de l’IEM et du SESSAD, vivant un handicap moteur, mais aussi auprès des familles. Je suis très attachée aux jeunes. Je tâche de rendre un peu de ce que j’ai reçu moi-même étant petite, de partager mon expérience. Cet aspect-là est très important pour moi, même si en tant que mal voyante je n’ai pas le même type de handicap bien-sûr. Mais j’ai envie de transmettre cela aux jeunes et aux familles.
Le sport est très présent au Centre Lecourbe. En tant que sportive, que transmettez-vous aux jeunes ?
Dès lors qu’il y a un partage d’expérience à donner, j’essaye de le faire, à l’égard du handicap mais aussi du sport ! Par exemple, il y a un jeune du Centre qui a été repéré en natation par la Fédération handisport. Il a pu participer à des championnats nationaux, alors je l’encourage et lui donne des petits tuyaux. Le sport est un appui dans mon métier auprès des jeunes.
« Le triathlon me permet de faire plus largement du sport un acte thérapeutique pour les jeunes. C’est un bon moyen de faire entrer les ados dans un parcours de rééducation qui autrement peut être compliqué à accepter pour eux parfois ».
A côté de votre vie professionnelle au Centre Lecourbe, vous avez également un parcours de sportive de haut niveau. Pouvez-vous nous en parler ?
A l’âge qu’ont les jeunes de Lecourbe, je n’étais pas du tout sportive ! A la fin de l’adolescence, j’étais en dispositif d’inclusion, pour faire de l’aviron au sein d’un groupe. C’était la première fois de ma vie que mon handicap n’était plus un sujet, que j’ai pu m’exprimer sans cette différence, en aviron. On était tous dans le même bateau, c’est le cas de le dire ! Puis mon compagnon, qui s’est mis au triathlon, m’a encouragée à faire de l’athlétisme en 2019, juste avant mon diplôme de kiné. En 2020, il m’a offert un tandem pour mon anniversaire et m’a dit « tu as deux mois pour te préparer aux championnats de France de paratriathlon, tu es inscrite ! ». Merci pour le cadeau. Un sacré challenge ! Deux mois plus tard, je luttais pour terminer mon 750m de natation en eau libre, mes 20 km à vélo et les 5km course à pied. Je ne m’en sentais pas capable mais je l’ai fait. Un an plus tard, j’ai participé de nouveaux à ces championnats, avant de nous entrainer ma guide et moi pour notre première course internationale. Tout s’est alors enchaîné très vite : en 2022, j’ai réussi les tests pour entrer en équipe de France, puis suis arrivée 5e des championnats d’Europe en mai, et 6e des championnats du monde en novembre. Prochaine étape : la préparation aux Jeux Paralympiques de Paris !
Comment se déroule votre préparation aux Jeux Paralympiques de Paris et comment articulez-vous ces deux aspects de votre vie ?
Disons qu’il y a un an, tout cela me paraissait abstrait, aujourd’hui c’est de plus en plus concret. De juillet 2023 à juillet 2024 est édité un classement spécifique pour les Paralympiades. Ce classement permet de décrocher ou non son ticket pour les Jeux. Je m’entraine donc à raison de 30h par semaine en périodes de stages, et en période d’activité à Lecourbe une quinzaine d’heures contre 22h à Lecourbe. J’essaye d’articuler au mieux mon activité de kiné et ma préparation. Autant dans mon métier de kiné je sais comment ça se passe, il n’y a pas beaucoup d’imprévus, autant en paratriathlon c’est l’inconnue la plus complète !
Comment vous sentez vous ?
Les Jeux me semblent encore loin et en même temps c’est tout proches. Je n’ai qu’une saison derrière moi et je dois montrer que j’ai progressé pour être sélectionnée. C’est donc très excitant et motivant mais en même temps c’est une certaine pression.
« Au travers du sport, les personnes valides nous voient faire des choses qu’elles-mêmes parfois ne font pas, donc ça ouvre des perspectives, c’est éducatif. Elles voient au-delà du handicap de la personne, ce qui est précieux pour changer les regards sur le handicap je pense ».
Comment les équipes de la Fondation Saint Jean de Dieu et du Centre Lecourbe vous soutiennent-elles ?
Je suis attachée au Centre Lecourbe, aux enfants et aux équipes. Quand je m’absente à un stage, je me dis que c’est du temps perdu pour les jeunes, ce qui me fait culpabiliser… Mais ils m’encouragent, je partage de beaux moments avec eux, les familles et les équipes aussi me soutiennent et ça fait chaud au cœur. Plus généralement, la Fondation me soutient et je lui en suis très reconnaissante de m’encourager, m’accompagner dans mes projets personnels, d’accepter de réorganiser mon temps de travail. Je veux pouvoir me donner cette chance-là, de manière intelligente, sans mettre personne en difficulté.
De votre expérience personnelle, quelle est la place du handicap dans le sport aujourd’hui en France ?
Il y a de plus en plus de politiques mises en place pour favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap, notamment dans le sport et c’est très encourageant. Et ça se voit : il a de plus en plus d’athlètes vivant un handicap. Auparavant, il y avait peu de participants et beaucoup de catégories n’étaient pas représentées. En paratriathlon, il y avait 6 catégories (soit 60 participants) représentées aux Jeux de Rio en 2016, il y en aura 11 à Paris (soit 120 participants) en 2024, sur les 12 possibles. Ça devient intéressant ! Evidemment, être parasportif nécessite sans doute une volonté encore plus forte car il y a beaucoup d’obstacles à surmonter. C’est vrai dans le sport mais aussi dans la vie en général.
Toute la famille hospitalière est avec toi Héloïse !
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